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La semaine du droit public général (côté Cour de cassation)

Public - Droit public général
23/11/2020
Présentation des dispositifs des derniers arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit public général.
Responsabilité de l'État – fonctionnement défectueux du service public de la justice
 « Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 avril 2019), à l'occasion d'une information judiciaire, ouverte des chefs de diverses infractions commises au préjudice d'une entreprise de transport maritime de passagers, exploitée en dernier lieu par la Société des armateurs côtiers marseillais (la SACM) dont Monsieur X était le gérant, le juge d'instruction a, notamment, mis en examen ce dernier et procédé, le 21 mars 2006, à la saisie de navires. Par ordonnance du 18 avril 2006, confirmée en appel, il a refusé la restitution des navires et prescrit leur remise au service du Domaine en vue de leur aliénation. Le pourvoi en cassation formé par Monsieur X a été rejeté le 23 janvier 2007. Par arrêt partiellement infirmatif du 2 février 2011, la cour d'appel a condamné Monsieur X pour abus de confiance, abus de biens sociaux, faux, obtention indue de documents administratifs et extorsion de fonds, à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, cinq ans d’interdiction de l'activité de transport maritime, a prononcé la confiscation de navires et, renvoyant le prévenu des fins des poursuites exercées contre lui pour des faits commis à des dates couvertes par la prescription, a ordonné la restitution de cinq navires, dont quatre avaient été vendus entre temps par le service du Domaine. Le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt a été rejeté le 5 décembre 2012.
Invoquant un fonctionnement défectueux du service public de la justice résultant de la décision de saisir les navires finalement restitués, du défaut de gardiennage et d’entretien de ceux-ci ayant conduit à leur dépréciation, ainsi que des ventes réalisées à un prix inférieur à la valeur réelle, Monsieur X a assigné l'Agent judiciaire de l'Etat en réparation de ses préjudices, sur le fondement de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire
(…) La responsabilité de l'Etat en raison d'un dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice ne peut être engagée que sur le fondement de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire, à l'exclusion des dispositions de droit commun prévues par le Code civil.
Il résulte de ce dernier texte que l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice, que cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice et que constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi.
Hors le cas de dommages causés aux particuliers du fait d'une violation manifeste du droit de l'Union européenne par une décision d'une juridiction nationale statuant en dernier ressort, l'action en responsabilité de l'Etat ne saurait avoir pour effet de remettre en cause une décision judiciaire, en dehors de l'exercice des voies de recours.
 
En premier lieu, l’arrêt retient à bon droit que le grief, tiré de ce que les saisies ont été pratiquées à l'occasion d'une procédure qui a donné lieu à une relaxe partielle pour prescription, relève de la critique de décisions rendues par le juge d'instruction le 18 avril 2006, la chambre de l'instruction le 14 juin 2006 et la Cour de cassation le 23 janvier 2007, de sorte qu’un tel moyen, sauf à instaurer une nouvelle voie de recours distincte de celle prévue par les dispositions légales, est inopérant.
En second lieu, l'arrêt énonce que la procédure de saisie et de remise des navires aux fins d'aliénation a été validée par les magistrats en charge de l'instruction comme conforme aux intérêts de Monsieur X.
De ces énonciations et appréciations, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les quatrième, cinquième et sixième branches, la cour d’appel a exactement déduit que les décisions juridictionnelles en cause ne pouvaient engager la responsabilité de l’Etat.
Le moyen n’est donc pas fondé ».
Cass. 1re civ., 18 nov. 2020, n° 19-19.517, P+B *


*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 23 décembre 2020.
Source : Actualités du droit