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Aides d'État et Covid-19 : la position de la Commission européenne face à la crise sanitaire mondiale

Affaires - Droit économique
Public - Droit public des affaires
23/03/2020
Dans une déclaration du vendredi 13 mars 2020, la Commission européenne a exprimé la possibilité pour les États membres de déroger au régime de prohibition des aides d'État. Margrethe Vestager, commissaire européenne en charge de la concurrence, a fait part du souhait de Bruxelles d'aller vite avec les États membres pour apporter aux entreprises tout le soutien nécessaire et endiguer la crise. L’objectif de la Commission européenne est clair : s'assurer que les entreprises disposent des liquidités nécessaires pour éviter les faillites. 
Rédigé sous la direction de Claudie Boiteau, en partenariat avec le Master Droit et régulation des marchés de l’Université Paris-Dauphine

La propagation du virus a poussé les États membres à prendre des mesures de fermeture administrative et de confinement qui affectent les échanges commerciaux et privent les entreprises de flux de trésorerie entrants. Des mesures immédiates de soutien étatique permettent à ces entreprises de continuer à fonctionner malgré la crise. À terme, les objectifs sont ceux de la sauvegarde des entreprises et de la protection du marché intérieur. 
 
Les aides d'État sont en principe prohibées par l'article 107, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après TFUE), en ce qu'elles confèrent un avantage à une entreprise au détriment d'une autre et faussent la libre concurrence au sein du marché intérieur. 
 
Remédier aux dommages causés par des événements extraordinaires
 
Certaines situations peuvent toutefois justifier une dérogation à ce principe, notamment au titre de l'article 107, paragraphe 2, du TFUE qui admet de plein droit les aides publiques « destinées à remédier aux dommages causés par [des] événements extraordinaires ». S’agissant du régime d'aides danois de 12 millions d'euros destiné à remédier aux dommages causés par les annulations de grands événements publics à la suite de l'épidémie de Covid-19, première mesure d'aide d'État notifiée par un État membre à la Commission en lien avec cette épidémie, la Commission européenne a considéré que la crise sanitaire du Covid-19 entrait dans le champ de cette dérogation, en ce qu’elle est un événement extraordinaire (Dossier SA.56685 – Schéma de compensation pour des annulations d'événements à cause du COVID-19).
 
La Commission européenne indique dans sa déclaration du 13 mars 2020 mettre en place des procédures pour traiter rapidement les aides souhaitées par les États membres. Pour répondre efficacement à la crise du Covid-19, Bruxelles met notamment à disposition des autorités nationales une ligne téléphonique pour que ces dernières puissent poser toutes leurs questions, demander des conseils ou solliciter un modèle de notification d'aide d’État. Au surplus, lorsque les aides doivent être notifiées, les délais de traitement sont voulus courts. À titre d’exemple, le gouvernement danois n'a dû attendre que 24 heures pour voir son mécanisme de compensation accepté. 
 
Les aides concernées
 
Les aides d'État susceptibles d'être octroyées sont protéiformes et visent à coller aux différentes réalités que traversent les entreprises. 
Dans sa déclaration, la Commission européenne présente trois exemples d’aides d’État. Tout d’abord, les schémas d’aides qui visent à compenser les secteurs les plus touchés par la crise du Covid-19, comme le tourisme, l'événementiel ou encore la restauration.
Dans un second temps, la Commission européenne précise que les États membres peuvent fournir en urgence les liquidités nécessaires aux petites et moyennes entreprises pour éviter la faillite. Au 13 mars 2020, elle a indiqué que neuf États membres avaient déjà mis en œuvre des schémas d’apport de liquidités aux entreprises. Bruxelles entend accompagner les États membres qui souhaiteraient mettre en place des systèmes similaires ou augmenter les sommes allouées à des schémas existants. 
Enfin, la Commission européenne vise les banques en reconnaissant leur rôle essentiel pour passer outre cette crise sanitaire majeure. Bruxelles reconnaît aux États membres la possibilité d’accorder des garanties aux banques pour que ces dernières disposent des liquidités nécessaires pour leurs clients.
 
Dans une allocution du lundi 16 mars 2020, le Président Emmanuel Macron a fait part des mesures économiques prises par le gouvernement français pour soutenir les entreprises. Ces mesures s'inscrivent parfaitement dans la continuité de la déclaration de la Commission européenne. Le plan d’urgence de plusieurs dizaines de milliards d’euros tel qu'annoncé se caractérise par une série de mesures, comme la suspension des taxes et impôts.
 
Pour aller plus loin
– Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle privé, voir Le Lamy Droit économiquenos 2210 et suivants.
– Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle public, voir Le Lamy Droit public des affairesnos 775 et suivants.
 
D’autres articles sur ce thème
L’économie européenne à l’épreuve du Covid-19 : un encadrement temporaire des aides d’État fondé sur « une perturbation grave de l’économie d’un État membre », Actualités du droit, 24 mars 2020 ;
– Covid-19 et aides aux entreprises : le détail du dispositif du gouvernement, Actualités du droit, 18 mars 2020 ;
– Covid-19 : ce que contiennent le projet de loi et le projet de loi organique, Actualités du droit, 19 mars 2020.

Marie-Alice BERTÉ
Louis GRALL
Source : Actualités du droit