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Ressortissant d'un pays non UE ayant la garde exclusive d'un mineur de l'UE : quelles justifications pour le refus de séjour ou l'expulsion ?

Public - Droit public général
Pénal - Droit pénal spécial
Civil - Personnes et famille/patrimoine
14/09/2016
Le droit de l'Union européenne (UE) s'oppose à une réglementation nationale qui, de manière automatique, refuse un permis de séjour ou impose une expulsion à un ressortissant d'un pays non UE qui a la garde exclusive d'un citoyen mineur de l'UE au seul motif que ce ressortissant a des antécédents pénaux, dès lors que ce refus ou cette expulsion oblige l'enfant à quitter le territoire de l'Union. Telle est la solution apportée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) dans deux décisions du 13 septembre 2016.
Dans les deux espèces, en raison d'antécédents pénaux, deux ressortissants non UE se sont vus notifier un refus de permis de séjour et une décision d'expulsion par l'État membre d'accueil et de nationalité de leurs enfants citoyens de l'UE dont ils ont la garde. Les juridictions espagnoles et britanniques interrogeaient la CJUE sur le point de savoir si l'existence d'antécédents pénaux pouvait, à elle seule, justifier le refus d'un droit de séjour ou l'expulsion d'un ressortissant d'un pays non UE qui a la garde exclusive d'un citoyen mineur de l'UE.

La Cour constate d'abord que M. M., sa fille polonaise, son fils espagnol et l'enfant de Mme C. bénéficie du droit de séjour. Elle indique, ensuite, que le Traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) s'oppose à ce qu'une mesure nationale prive un citoyen de l'UE de ses droits et qu'une telle privation résulterait d'un refus de séjour ou de l'expulsion d'un ressortissant non UE obligeant son enfant citoyen de l'UE à quitter le territoire de l'UE.

La CJUE précise, toutefois, qu'il est possible pour les États de justifier d'une dérogation au droit au séjour pour des raisons d'ordre ou de sécurité publique à condition qu'elle soit conforme au principe de proportionnalité. Selon la Cour, dans la première espèce, la condamnation ne peut justifier le refus de séjour de M. M. sans évaluation de son comportement personnel, ni de l'éventuel danger qu'il pouvait représenter pour l'ordre public ou la sécurité publique. La Cour précise, ensuite, qu'il est, aussi, possible dans des circonstances exceptionnelles, qu'un État puisse adopter une mesure d'expulsion en invoquant l'exception liée au maintien de l'ordre public et à la sauvegarde de la sécurité publique. Pour cela, il est nécessaire d'évaluer si, compte tenu des infractions pénales commises par un ressortissant d'un pays non UE ayant la garde exclusive d'un citoyen mineur de l'UE, son comportement personnel constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pouvant porter atteinte à un intérêt fondamental de la société. Il appartiendra, sur ce point, à la juridiction britannique d'apprécier le degré de dangerosité de Mme C. en mettant en balance les intérêts en présence et, particulièrement, l'intérêt supérieur de l'enfant.
Source : Actualités du droit