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Refus de titularisation : <i>quid</i> de la faute disciplinaire ?

Public - Droit public général
28/02/2020
Dans un arrêt rendu le 24 février, le Conseil d’État précise dans quelles conditions des éléments pouvant caractériser une faute disciplinaire peuvent être pris en compte pour motiver un refus de titularisation.
Un adjoint technique territorial stagiaire s’était vu refuser sa titularisation pour insuffisance professionnelle et avait demandé au tribunal administratif de l’enjoindre à l’autorité territoriale. Après un rejet par les juges de première instance, la cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé le jugement et demandé le réexamen de la situation.
 
La réglementation permet le licenciement des fonctionnaires stagiaires n’ayant pas donné satisfaction (D. n° 2006-1690, 22 déc. 2006, art. 8, portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux.).
 
Le Conseil d’État rappelle dans son arrêt qu’un agent public stagiaire « se trouve dans une situation probatoire et provisoire ».
 
Une décision de refus de titularisation, a-t-il rappelé, « est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne ».
 
Il en déduit que l’autorité compétente ne peut « prendre légalement une décision de refus de titularisation (…) que si les faits qu’elle retient caractérisent des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé ».
 
Le Conseil différencie bien l’insuffisance professionnelle de la faute disciplinaire, en expliquant qu’une telle faute peut également justifier un refus de titularisation, mais seulement si l’agent « a été mis à même de faire valoir ses observations », règle appliquée de longue date (CE, 14 juin 1968, n° 73091) et rappelée à plusieurs reprises (v. notamment CE, 3 déc. 2003, n° 256879, ou CE, 3 déc. 2003, no 236485).
 
La Haute cour donne ensuite un mode d’emploi au juge, en listant les éléments à vérifier pour apprécier la légalité d’une décision de refus de titularisation :
  • exactitude matérielle des faits ;
  • absence d’erreur de droit ;
  • absence d’erreur manifeste d’appréciation sur l’insuffisance professionnelle ;
  • absence de caractère de sanction disciplinaire ;
  • absence de détournement de pouvoir ;
  • dans l’hypothèse où les motifs caractérisent à la fois une insuffisance professionnelle et des fautes disciplinaire, possibilité pour l’agent de faire valoir ses observations.

En l’espèce, note le Conseil, les juges d’appel ont relevé que la décision de refus de titularisation reposait sur les éléments suivants :
  • des absences injustifiées ;
  • le fait que l’agent stagiaire n’accomplisse que les tâches qui l’intéressait.
 
Selon la Haute cour, « en jugeant que les faits ainsi reprochés (…) ne pouvaient caractériser une insuffisance professionnelle justifiant légalement un refus de titularisation au motif qu’ils étaient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires, la cour a commis une erreur de droit ». Il reviendra donc aux juges d’appel, dans le réexamen de la légalité de la décision, et s’ils estiment que les faits étaient constitutifs de fautes disciplinaires, de vérifier si l’agent a été mis à même de faire valoir ses observations.
 
Les motifs permettant d’annuler un refus de titularisation et un licenciement en cours de stage ne sont pas les mêmes, et le juge doit exercer un contrôle plus approfondi sur les décisions de licenciement durant le stage. C’est ce qu’a rappelé le Conseil d’État dans un arrêt du 11 décembre dernier (CE, 11 déc. 2019, n° 427522), v. actualité du 26 déc. 2019, Absence de titularisation à l’issue du stage : quel contrôle du juge ?)
 
Pour en savoir plus :
Source : Actualités du droit