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Concours : l’acheteur peut verser une prime au candidat dont l’offre n’est pas conforme !

Public - Droit public des affaires
26/02/2020
Par trois arrêts rendus le 10 février 2020, le Conseil d’État a clarifié les conditions du versement de la prime, dans le cas des marchés passés selon une procédure de concours, à un (ou plusieurs) candidat(s) dont l’offre n’est pas conforme aux exigences requises.
En l’espèce, un département avait lancé un concours en vue de l’attribution d’un marché de maîtrise d’œuvre. La procédure avait été déclarée sans suite car trois des cinq projets admis initialement n’étaient pas conformes aux exigences du programme. Le département ayant décidé de ne pas verser la prime de concours à ces trois candidats, ces derniers ont saisi le juge administratif.

En première instance ainsi qu’en appel, les juges ont rejeté leur demande tendant au paiement de la prime. Les candidats se sont pourvus en cassation devant le Conseil d’État.

Ancien code des marchés publics

La question était donc de savoir si une offre non conforme au programme privait nécessairement le candidat du versement de sa prime.

Pour la cour administrative d’appel, la réponse était positive. En effet, l’article 74, III du code des marchés publics (applicable au cas d’espèce), dispose : « les candidats ayant remis des prestations conformes au règlement du concours bénéficient d'une prime » (disposition reprise aujourd’hui à l’article R. 2162-20 du code de la commande publique). Les juges d’appel en déduisaient que cette prime ne pouvait donc être versée qu’aux candidats ayant remis un projet conforme, excluant les autres du champ d’application de l’article.

Dans sa décision, le Conseil d’État valide la première partie du raisonnement de la cour administrative d’appel, à savoir :
– que cet article impose effectivement le versement d’une prime aux candidats ayant déposé une offre conforme ;
– et que le pouvoir adjudicateur est bien fondé à refuser son versement si les études réalisées par les participants se révèlent non conformes (ainsi qu’il a déjà été jugé, voir not. CE, 5 août 2009, n° 322997, Commune de Deauville).

Toutefois, le Conseil invalide la deuxième partie du raisonnement et la décision en découlant. Il juge au contraire qu’en vertu des textes applicables, l’acheteur public ne se trouve pas dans l’obligation de refuser le versement d’une telle prime et qu’il peut donc, même en cas d’offre non conforme, décider de verser une prime au candidat.

Dans le cas présent, le règlement du concours prévoyait que « dans le cas où une offre serait incomplète ou ne répondrait pas au programme, une réduction ou la suppression de la prime pourra être effectuée par le maître de l'ouvrage sur proposition du jury ». Le Conseil d’État juge donc que la cour n’aurait pas dû en déduire que la prime ne pouvait simplement pas être versée et annule les arrêts rendus.

Et pour l’avenir ?

Pour les contrats passés sous l’empire de l’ancien code des marchés publics, la question est ainsi tranché par la Haute juridiction.

S’agissant des contrats passés sous le nouveau régime défini par le code de la commande publique, entré en vigueur le 1er avril 2019, la question est clarifiée par l’article R. 2172-4, selon lequel « l'acheteur précise dans les documents de la consultation les modalités selon lesquelles la prime peut être réduite ou supprimée. Il verse cette prime aux participants au concours sur proposition du jury ».

Le montant de la prime est ainsi désormais librement défini par l’acheteur et indiqué dans les documents de la consultation.
 
Pour aller plus loin
– Pour des développements détaillés sur le concours dans les marchés publics de maîtrise d’œuvre, se référer au Lamy Droit public des affaires, n° 2290 à 2298.
– Sur le choix du/des lauréat(s) du concours et l’attribution de la prime, voir le n° 2296.
Source : Actualités du droit