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Livraison de matériaux sur un chantier public : contrat public ou privé ?

Public - Droit public des affaires
17/12/2019
Dans une décision rendue le 9 décembre 2019, le Tribunal des conflits a jugé que le contrat par lequel un entrepreneur de travaux confie à un transporteur la livraison de matériaux sur un chantier public est un contrat privé.
Dans cette affaire, un entrepreneur de travaux avait confié à un voiturier la livraison de matériaux sur le chantier de construction d'un centre hospitalier. Considérant que ce dernier était partie au contrat en qualité de destinataire des prestations, le transporteur a intenté à l'encontre de l’hôpital une action directe en paiement, sur le fondement de l'article L. 132-8 du code de commerce.
 
Pour rappel, selon cet article, « la lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier ». Aussi, le voiturier dispose d’une « action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport ».
 
Le juge judiciaire saisi de l’affaire s’était estimé incompétent pour connaître du litige au motif que les livraisons concernaient l'exécution d'un marché public. Pour le tribunal administratif, le litige ne ressortissait pas à la compétence de la juridiction administrative car le contrat de transport avait été conclu entre des sociétés de droit privé et ne faisait pas participer le transporteur à l'exécution d'un travail public.
 
Le Tribunal des conflits a donc été saisi à son tour afin de trancher la question de la nature du contrat litigieux. Appliquant les critères de qualification des contrats publics, le juge des conflits a estimé que :
– le contrat en cause « n'a pas pour objet l'exécution d'un service public » ;
– « il ne comporte aucune clause, qui (…) impliquerait, dans l'intérêt général, qu'il relève du régime exorbitant des contrats administratifs » ;
– « le transporteur ne participe pas à une opération de travaux publics ». Sur ce dernier point, le tribunal affirme clairement que « le fait que la marchandise acheminée soit destinée à l'exécution de tels travaux n'a pas en elle-même d'incidence sur la nature du contrat de transport ».
 
Il en découle que le contrat en cause est un contrat de droit privé. L’action relative aux prestations exécutées formée par le transporteur relève donc de la compétence de la juridiction judiciaire.
 
Pour aller plus loin
Sur l’identification des contrats publics, voir Le Lamy Droit public des affaires, nos 1453 et suivants de l’édition 2019.
Sur les critères jurisprudentiels des contrats publics, voir les nos 1475 et suivants.
Source : Actualités du droit