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TURPE 5 : la CRE doit revoir sa copie

Public - Droit public des affaires
28/03/2018
Le 9 mars 2018, le Conseil d’État est venu prononcer l’annulation partielle du TURPE 5. La décision vient remettre en cause la méthode de calcul des tarifs d’utilisation des réseaux publics de distribution d’électricité applicables depuis le 1er août 2017. La Commission de régulation de l’énergie est ce faisant invitée à réviser son dispositif s’agissant de la prise en compte des charges supportés par les opérateurs pour financer le développement des réseaux.
Les méthodes utilisées pour établir les tarifs d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité, dits « TURPE », sont fixées par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en vertu de l’article L. 341-3 du code de l’énergie. Rappelons que ces tarifs visent à couvrir les coûts d’exploitation, d’entretien et de développement pris en charge par les gestionnaires de réseaux publics de distribution d’électricité. Par deux délibérations du 17 novembre 2016 et du 19 janvier 2017, le régulateur a fixé la méthode de calcul des tarifs applicables à compter du 1er août 2017 (tarifs dits « TURPE 5 »).

Saisi des recours en annulation de ces délibérations notamment formés par les opérateurs Enedis et EDF, le Conseil d’État a rejeté l’essentiel des critiques formulées à l’encontre du dispositif avant de prononcer néanmoins une annulation très partielle, concernant les modalités d’intégration, dans le calcul des tarifs, des charges afférentes au capital investi destiné à financer le développement des réseaux.

Cette méthode tient compte de la spécificité du régime d’exploitation du réseau de distribution d’électricité.  Dans l’hypothèse où des biens ont été concédés au gestionnaire du réseau par des collectivités territoriales, ces biens sont financés par ces collectivités et ont un coût de revient moindre pour le gestionnaire du réseau.

Les juges du Palais-Royal estiment que, compte tenu de la méthodologie ainsi appliquée par la CRE, celle-ci ne pouvait faire abstraction de ce que certaines charges d’investissement exposées par la société Enedis de 2005 à 2009 sous l’empire du « TURPE 2 » avaient été supportés par l’opérateur, sur ses capitaux propres, sans avoir été compensées par les tarifs.

Les délibérations sont sur ce point annulées et le gestionnaire du réseau est exhorté à fournir au régulateur toutes les données utiles pour calculer les coûts du capital investi qu’il a effectivement assumés pendant cette période (points 32 à 34 de la décision).

Et le Conseil d’État d’indiquer toutefois que l’annulation ne prendra effet qu’à compter du 1er août 2018, afin que la CRE dispose du temps suffisant pour produire une nouvelle délibération. Les tarifs appliqués depuis le 1er août 2017 jusqu’à cette date seront donc considérés comme définitifs afin que les usagers ne soient pas pénalisés par cette décision qui aurait pu conduire à l’émission de factures rectificatives.
Cette modulation dans le temps des effets de l’annulation témoigne d’une nouvelle application de la jurisprudence « AC ! » (CE, ass., 11 mai 2004, nos 255886, 255887 et 255888, Assoc. AC ! et a., pour en savoir plus, v. Le Lamy Droit public des affaires, n° 6339).
 
Source : Actualités du droit