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Recours de trois demandeurs d'asile à l'encontre de la déclaration « UE-Turquie » : incompétence du Tribunal de l’Union européenne

Public - Droit public général
07/03/2017
Le Tribunal de l'Union européenne se déclare incompétent dans trois ordonnances du 28 février 2017 pour connaître des recours de trois demandeurs d'asile à l'encontre de la "déclaration UE-Turquie" tendant à résoudre la crise migratoire.
 
En l'espèce, deux ressortissants pakistanais et un ressortissant afghan se sont rendus depuis la Turquie en Grèce où ils ont introduit des demandes d'asile. Dans ces demandes, ils exposaient qu'ils risquaient d'être persécutés en cas de retour dans leurs pays d'origine respectifs. Compte tenu de la possibilité, en application de la "déclaration UE-Turquie", d'un renvoi en Turquie en cas de rejet de leurs demandes d'asile, ces personnes ont décidé d'introduire des recours devant le tribunal de l'Union européenne afin de mettre en cause la légalité de cette déclaration. Selon eux, il s'agit d'un accord international que le Conseil européen, en tant qu'institution agissant au nom de l'Union, aurait conclu avec la République de Turquie. Ils considèrent que cet accord viole les règles du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) relatives à la conclusion d'accords internationaux.
 
Le tribunal précise que ce sont les États membres qui ont décidé des points d'action complémentaires visés dans cette déclaration et les chefs d'État ou de gouvernement qui ont rencontré, en cette qualité, leur homologue turc lors de la réunion ayant donné lieu au communiqué de presse. Le tribunal estime donc que ce n'est pas l'Union mais ses États membres, en tant qu'acteurs de droit international, qui ont mené des négociations avec la Turquie. Le tribunal considère, par conséquent, que ni le Conseil européen ni aucune autre institution de l'Union n'a décidé de conclure un accord avec le gouvernement turc au sujet de la crise migratoire. Il en déduit la solution susvisée.
 
À titre surabondant, au regard de la référence, dans la déclaration "UE-Turquie", au fait que "l'[Union] et la [République de] Turquie étaient convenu[e]s de points d'action complémentaires", le tribunal considère que, même à supposer qu'un accord international ait pu être informellement conclu lors de la réunion du 18 mars 2016, ce qui, en l'espèce, a été nié par le Conseil européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission européenne, cet accord aurait été le fait des chefs d'État ou de gouvernement des États membres de l'Union et du Premier ministre turc. Or, dans le cadre d'un recours introduit au titre de l'article 263 TFUE, le tribunal n'est pas compétent pour statuer sur la légalité d'un accord international conclu par les États membres.
 
Par Marie Le Guerroué
 
Source : Actualités du droit