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Méconnaissance de l’obligation de ministère d’avocat aux Conseils : l’invitation à régulariser doit être adressée au requérant

Public - Droit public général
29/11/2023
Le ministère d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation est rendu obligatoire par le Code de justice administrative pour introduire un recours devant le Conseil d’État. En cas de non-respect de cette obligation, une invitation à régulariser le pourvoi doit être adressée au requérant, quand bien même une copie serait adressée à l’avocat qui l’a représenté avant l’introduction du pourvoi. C’est ce qu’a déclaré le Conseil d’État dans un arrêt rendu le 21 novembre 2023.
Dans un arrêt rendu le 21 novembre 2023, le Conseil d’État rappelle l’obligation du ministère d’avocat aux Conseils pour former un recours, prévue par l’article R. 821-3 du CJA, ainsi que la possibilité pour le président de la chambre de décider par ordonnance de ne pas admettre un pourvoi irrecevable pour défaut de ministère d’avocat (CJA, art. R. 822-5). Il annonce ensuite qu’en application de l’obligation prévue par le CJA d’inviter l’auteur des conclusions à une régularisation, l’envoi de cette demande au seul mandataire ne peut conduire le président de la chambre à refuser l’admission d’un pourvoi pour irrégularité.
 
Obligation d’inviter l’auteur des conclusions à les régulariser
 
La Haute juridiction rappelle qu’il existe dans certains cas une obligation d’inviter l’auteur de conclusions irrecevables à les régulariser. L’article R. 612-1 du CJA prévoit en effet : « Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser ».
 
Alors que l’article R. 612-1 parle d’ « auteur » des conclusions, le Conseil d’État déclare que l’invitation à régulariser doit obligatoirement être adressée au requérant, quand bien même l’auteur des conclusions serait un mandataire, tel qu’un avocat autre qu’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation : « Il résulte de ces dispositions que l'irrecevabilité tirée de ce qu'un pourvoi en cassation a été introduit sans le ministère d'un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation ne peut être opposée à des conclusions soumises à cette obligation que si le requérant, invité à régulariser son pourvoi, s'est abstenu de donner suite à cette invitation ».

Invitation à régulariser le pourvoi adressée au requérant
 
Il annonce même que l’envoi de cette invitation à régulariser à l’avocat est facultative, et que seul l’envoi au requérant est obligatoire et peut conduire, en cas d’absence de régularisation, au rejet des conclusions pour irrecevabilité. Il déclare ainsi : « Si une copie de cette demande de régularisation peut être adressée à un mandataire du requérant, y compris un avocat autre qu'un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, qui l'aurait représenté avant l'introduction du pourvoi devant le Conseil d'État, une demande adressée à un tel mandataire ne saurait tenir lieu de demande de régularisation adressée au requérant. »
 
Dans cette affaire, le requérant avait fait appel devant la cour administrative d’appel d’un jugement concernant une décision de recouvrement d’un indu de RSA, par l’intermédiaire d’un avocat. Or, ce type de litige fait partie de ceux pour lesquels le tribunal administratif est compétent en premier et dernier ressort, en application du 1° de l’article R. 811-1 du Code de justice administrative. La présidente de la cour administrative d’appel avait alors transmis la requête par ordonnance au Conseil d’État. La présidente de la 1ère chambre de la section du contentieux du Conseil d’État avait ensuite rendu une ordonnance en application du 2° de l’article R. 822-5 du CJA refusant d’admettre le pourvoi contre le jugement pour irrecevabilité, faute d’avoir été introduit par le ministère d’un avocat.
 
Le requérant a ensuite formé un recours en révision, en application de l’article R. 831-1 du Code de justice administrative.
 
En l’espèce, le Conseil d’État relève que l’invitation à régularisation pour défaut de ministère d’avocat au Conseil d’État et à la Cour a été adressée seulement à l’avocat qui avait présenté des conclusions devant la Cour, et non au requérant. La Haute juridiction déclare qu’il ne pouvait donc être reproché au requérant, qui n’avait pas reçu d’invitation à régulariser son pourvoi, une méconnaissance de l’obligation de recours au ministère d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation. Le recours en révision de l’ordonnance introduit par le requérant est donc fondé, et l’ordonnance est déclarée non avenue.
Source : Actualités du droit